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Chapitre XIV) The last week

The last week

Le matin suivant la mort de Zack, son désormais ancien commandant de division a déjà pris la route. L'Illusion est parti rendre visite à son mentor. Autrefois son supérieur, aujourd'hui devenu son collègue, il a été le premier à deviner qu'Akorith allait faire partie des meilleurs soldats de la Nouvelle Armée.

À l'époque durant laquelle Hyxarkon n'était qu'un capitaine, il avait bataillé toute l'année 358 pour promouvoir Akorith en lieutenant dans la même division que lui, au jeune âge de dix-huit ans. Trois ans plus tard la Nouvelle Armée terminait les préparatifs de la Grande Expédition, et, toujours appuyé par la détermination du futur commandant l'Omniscient, le lieutenant Akorith Laetory était devenu capitaine, aux côtés d'Hyxarkon.

Le temps passant, l'échec de la Grande Expédition a fini par les séparer de division, mais ils en sont tous les deux devenus des commandants de renommée. Cette ascension dans la hiérarchie de la Nouvelle Armée, Akorith la doit à Hyxarkon, qui a toujours eu un coup d'avance sur lui. C'est pour cette raison que l'Illusion court chercher de l'aide à son ex-chef d'armée lorsqu'il en a besoin.

 

À Atarashî, Akorith frappe de bon matin à la porte du bureau d'Hyxarkon. Étrangement, l'énigmatique commandant ne s'est pas absenté et accepte l'entretien que son interlocuteur lui impose en l'invitant à s'asseoir sur le fauteuil en face de lui. Au lieu de ça, Akorith se dirige vers le buffet, se sert un whisky et s'asseoit sur ledit meuble.

- Zack Cepper, Shinken, est mort.

- Mort ou disparu ?

- Mort. Enfin, il l'était quand je l'ai incinéré. Qu'est-ce que ça change ?

- Hum... Rien, je voulais juste réfléchir un peu plus longtemps à ce que j'allais te répondre.

- Et tu vas me répondre quoi ?

Comme annoncé, Hyxarkon prend un peu le temps de réfléchir à sa réponse et quand ses yeux tombent sur le verre que s'est servi Akorith, une poignée d'instants fixes s'écoulent, puis un sourire l'illumine. Il se chuchote :

- Je savais bien que j'aurai une opportunité...

L'Illusion le fait répéter, et l'Omniscient de reprendre :

- Zack Cepper est mort, tu dis... Ce nom me dit quelque chose alors qu'il ne fait pas partie de ma division.

- Hmm... Moue-t-il. C'est bon signe, ça ?

- Plus pour Zack, en tout cas. Mais si je me souviens de son nom, c'est que son équipe a du talent. Ori Ishida, confonds-je ?

- Nan, c'est bien elle. Ori Ishida et Amy Witchness, les deux survivantes de son groupe.

- Je pense que cette fois, Lucy n'y verra aucun inconvénient.

- Oh. Euh... Ça veut dire qu'Ori va rejoindre ta division ?

- Mouaip et j'ai déjà une idée pour les présentations ! Répond Hyxarkon en se levant de son fauteuil et errant vers son acolyte.

- Si ce n'était pas toi, je ne t'aurais pas cédé Ori et Amy si facilement, tu sais ?

- Peut-être. Mais moi, je peux te piquer tes soldats comme ton whisky ! S'amuse-t-il à lui prendre son verre des mains.

Il en boit une gorgée, feint de ne pas en aimer le goût, puis se dirige vers le réfrigérateur pour ajouter un glaçon à ce qu'il reste du digestif. Enfin, il rend le verre à Akorith.

- Et je peux te rendre ton whisky bien meilleur.

- ...

- Tu es meilleur commandant que patron de bar ! Lance Hyxarkon en sortant de son bureau, laissant Akorith dans ses pensées, les yeux plongés au fond du verre.

- Patron de bar... Se répète-t-il avant d'avaler la fin du verre et de quitter le bureau sans prendre le temps de fermer la porte.

 

 

Non loin, au siège de la Nouvelle Armée, les quatre derniers Teishis de l'Omniscient sortent de leur déjeûner et quittent le réfectoire principal. Sitôt dehors, Zélyde est bousculée par un marcheur peu attentionné et s'érafle le coude du bras droit en tombant.

- Ouille ! Se crispe-t-elle.

- Je suis vraiment dé-... Zélyde ?

- Sylvain !

- Bah oui, c'est moi ! Avec qui d'autre le destin t'aurait-il réuni ?

- Eh bien... Euh... Ne sait-elle quoi répondre.

Il l'aide à se relever, puis s'ensuivent des salutations, mais Sylvain n'est pas avec son groupe militaire. Il explique justement, en fixant le plus profondémment les yeux de Zélyde, qu'il courait les rejoindre pour assister à un Tournoi.

- Tournoi ? Demande NidariQu'est-ce donc ?

- Sans déconner, tu ne connais pas ? C'est hyper populaire, ici ! C'est à celui qui sera plus rapide que les autres, soit à la course, soit à la chasse. Allez, je vais retrouver Gagatô et les autres, tchouss !

Et ainsi détale Sylvain au travers Atarashî. Ceux qui restent se regardent, abasourdis, sans ne savoir que faire. C'est pour eux le moment de découvrir à quoi ressemblent ces fameux Tournois qui rendent Sylvain si excité. Il est déjà loin, mais Nidari l'interpelle quand même.

- A-Attends ! Sylvain ! Emmène-nous !

- Oui bah grouillez-vous alors ! Leur crie-t-il de loin sans vraiment ralentir la cadence.

Les cinq enfants traversent en courant les rues d'Atarashî en direction de l'Ouest, où se trouve un grand bâtiment aux façades de verre. Malgré le reflet du Soleil, on distingue, depuis l'extérieur, qu'il y a plusieurs écrans géants à chaque étage, comme des salles de spectacles. Au pied de cette tour de verre, Sylvain retrouve son groupe, ses frères d'armes, et leur anonce qu'il a bien trouvé sa liasse de billets qu'il était parti chercher dans sa chambre. Les filles sont surprises, Nidari est choqué, et Kyhx... s'en tape, comme toujours.

- Qu'est-ce que tu fais avec cet argent ? L'agresse presque Nidari.

- Il faut tout t'expliquer, à toi ! Le taquine le grand chahuteur. C'est ce que je vais parier pour le Tournoi !

- Tu claques ton argent dans des paris incertains ?

- Il va falloir t'y faire, mon petit gars, maintenant qu'on est soldat, on va être payé à vie. Autant se faire plaisir quand on veut !

- Nous, on est encore trop jeune pour jouer de l'argent. Ils disent qu'il faut avoir quinze ans pour parier... Ajoute Gagatô d'abord penaud, puis avec un grand sourire à l'adresse de SylvainDu coup, on demande à notre banque !

Après tout, ils avaient raison. Les soldats d'Atarashî s'y engagent jusqu'à une invalidité physique, et tant qu'ils sont en exercice, ils sont logés, nourris, blanchis et payés, alors autant en profiter tant qu'ils ne sont pas en train de pourrir sous le pied d'un mutant. N'ayant rien d'autre à faire pour le moment, le groupe double de volume et tous les huit entrent dans le hall de la grande tour vitrée, dans lequel a doublé le volume sonore, tant le brouhaha intérieur résonne sur les parois de verre. Il y a plusieurs guichets, grossièrements tenus par des soldats qui entassent l'argent misé dans les différentes cagnottes. Au-dessus de ces guichets, on peut voir une fiche récapitulative du concurrent pour qui les participants ont misé. Comme à chaque tournoi, il y a douze concurrents qui rassemblent plus ou moins de votants, selon leur cote de popularité.

- Là ! Crie soudain Nidari en pointant un écran du doigt.

- Uh ? Tu le connais ? Demande naïvement Sylvain.

- Évidemment ! C'est le lieutenant Kora Zunka de la division de l'Armure ! On l'a déjà rencontré il n'y a pas si longtemps.

- J'avoue ne pas encore connaître toutes les têtes des haut-gradés... Avoue également Nosad, derrière sa mèche.

- Votons pour lui, Sylvain ! Qu'en penses-tu ? Propose GabudrielSi c'est un lieutenant, c'est qu'il est sûrement meilleur que les autres soldats.

- Tu as raison, allons-y !

En déposant la petite mise du conscrit Morcki, les deux groupes empruntent un escalier qui leur donne l'accès à plusieurs étages au-dessus, où sont disposés de grands écrans sur lesquels sont projetées les images filmées en direct du Tournoi. Cette session concerne une catégorie de participants particulièrement expérimentés dans l'épreuve de la chasse aux mutants.

Alors qu'il reste un bon moment avant le début de l'épreuve, les commentateurs sont déjà enthousiastes et véhiculent un engouement important pour garder une animation palpitante tout au long du spectacle. Certains ne sont pas très réceptifs et attendent simplement de regarder jusqu'où ira le concurrent pour lequel ils ont voté, Létaki et Zélyde restent encore perplexes et attendent de voir à quoi ressemblent le Tournoi. Sylvain et Gagatô, quant à eux, sont déjà à fond dans le spectacle et ont du mal à rester en place tant ils ne veulent pas rater une miette du show. Ces deux-là sont déjà passionnés et écoutent attentivement le présentateur qui décrit oralement les différentes statistiques des concurrents. Ces images sont aussi bien diffusées à Atarashî que dans les villes civiles du Torêningu, où certaines groupies se réunissent et gloussent sur certains soldats au physique attirant.

 

Senshutsu. Brasserie Raspebeerewery.

 

Le plus connu des bars du coin abrite en ce moment toute une troupe de buveurs. Les voix qui trinquent s'entremêlent aux verres clinquants et les tables bancales en bois solide remercient les dessous de verre. Le teneur doit bien l'avouer, la monnaie circule assez bien pour ne pas avoir besoin de se plaindre, et puis investir dans une télévision n'a, jusque-là, pas été une mauvaise idée : tous les paysans de passage s'arrache le moindre tabouret brinqueballant pour regarder le Tournoi d'aujourd'hui accompagné d'un rafraîchissement à la framboise, spécialité de la maison. Les affaires tournent bien, et parmi la clientèle, il accueille aussi des têtes connues, souvent placées aux chaises confortables du fond, réservées aux privilégiés.

- Regarde, ton Zunka, il a collecté la plus petite cagnotte aujourd'hui ! Il n'est clairement pas favori. Ça se passe bien avec lui ?

- C'est un bon gars, il bosse bien. Avec son statut de lieutenant il a beaucoup d'autres choses auxquelles penser qu'à la compétition, il n'ira pas plus loin dans le Tournoi, il n'aura pas de meilleur classement. Mais au moins, ça lui permet de se changer les idées, et il ne donne pas une mauvaise image de l'Armure alors ça me va.

Akorith l'Illusion et Tukh l'Armure, deux copains d'enfance, mais surtout deux des six commandants de la Nouvelle Armée n'ont rien de mieux à faire que d'aller boire un coup à la taverne devant un Tournoi. Ou plutôt, que de s'entretenir dans un lieu de détente.

- Tu m'as fait venir pour parler de quelque chose d'important ? Demande Tukh l'Armure de sa lourde voix.

- C'est quoi cette question ? Évidemment que j'ai du sérieux ! Répond son compère, faussement offensé.

- On sait que tu as l'habitude de passer beaucoup de ton temps libre dans le coin, alors on imagine des choses, hé hé hé... Le taquine-t-il.

- Ha ha ha ! Sacré Tukh !

Ils s'esclaffent à gorge déployée, comme pour décompresser de leur oppressante responsabilité quotidienne, vident leur pinte de bière à la framboise et Akorith reprend un air sérieux et fixe son interlocuteur dans les yeux avec un regard grave.

- Tu sais que les SÉA reviennent la semaine prochaine ?

- ... !

- Hyxarkon a trouvé un groupe pour les remplacer. Un groupe de soldats qui va savoir tenir tête à Tokû no Heiya. T'y crois, toi ?

- Si ça vient d'Hyxarkon, j'ai du mal à croire que ça foire. Là où je me pose une question, c'est de qui il s'agit.

Akorith se sert un autre verre, le boit et repose le verre avec fermeté. Il dévoile à son ami et collègue :

- Moi, je sais.

- ... ?

- C'est...

 

- Lucy Laetory, Sentôki de l'Omniscient ! Toutes les deux, vous êtes priées de lâcher vos armes et de vous rendre ! Ordre du commandant Hyxarkon l'Omniscient lui-même !

Cette jeune fille de vingt-six ans est accompagnée de son binôme, un dénommé Nestor Idir, de deux ans son cadet. Ils déclarent tous les deux être des soldats du rang de Sentôki, des soldats particulièrement endurcis, sous l'autorité du commandant Hyxarkon. Cette intervention musclée se déroule dans Heiya, au poste avancé le plus proche de la mer. En effet, Ori Ishida et sa sœur de combat Amy Witchness se voient contraintes de croiser le fer, une habitude que n'ont que très peu de soldats. La plupart du temps, les armes servent à tuer les mutants, lorsqu'ils envahissent des villages et des camps militaires ou quand une expédition de conquête est engagée. Pour les soldats qui assurent la milice, les armes ne servent presque exclusivement que de moyen de dissuasion pour intimider les malfaiteurs. En revanche, la vraie maîtrise du combat armé, d'homme à homme, est une qualité rare qu'on ne trouve que chez très peu de conscrits.

Les katanas d'Ori et de Lucy se raient mutuellement. L'épée de Nestor assène la hallebarde d'Amy. Les dents grincent et se grognent, chacun se battant pour ses raisons.

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